TDF - Pinot-Bardet, quel avenir pour les Français ?

 

Vidéo - Le Best Of du Tour de France 2014

Le Tour de France s'est achevé et c'est avec une joie immense que les supporters français ont pu assister à l'avènement de deux grands coureurs, Thibaut Pinot (FDJ.fr) 3e et Romain Bardet (Ag2r La Mondiale), 6e. Cette présence permanente à l'avant dès que la route s'élève a réveillé les vieux démons français. Sont-ils la fameuse "relève" ?

 

Deux graines de champion

Ils sont jeunes, talentueux et ambitieux. Ils ont surmonté avec brio les épreuves qui les ont attendus jusqu'à présent. Des tops 10, des victoires, le duo en collectionne. Ce Tour a permis de concrétiser un travail de longue haleine. Certes deux favoris sont partis en cours de route, mais le vélo ne se résume pas à monter le dernier le col le plus vite et à limiter au mieux la casse sur un contre-la-montre. 

Les deux jeunes (qui se connaissent très bien), se tirent vers le haut et à l'écran comme sur le papier, le résultat est là. Romain Bardet pointe à la 13e place World Tour, talonnant de deux petits points Tejay Van Garderen (BMC) et Thibaut Pinot est quant à lui 22e, coincé entre Chris Froome (Sky) et Rigoberto Uran (OPQS), excusez du peu. Ces performances en appellent forcément d'autres, c'est une évidence. Mais elles nous incitent surtout à penser que le meilleur est à venir pour l'un comme pour l'autre tant ils sont jeunes.

 

La tête sur les épaules

Si le champion forge sa réputation sur ses faits d'armes, sa légende peut malheureusement aussi se bâtir sur ses plus grandes défaillances, à l'instar de Laurent Fignon et ses fameuses 8 secondes de retard sur les champs. Ces défauts, Pinot comme Bardet s'efforcent de les gommer, voire d'en faire des atouts. La curiosité, la découverte, le travail sur soi sont autant de facteurs qu'ont pris en compte les deux coureurs, chacun de leur côté. Romain Bardet a par exemple pris la décision de découvrir la Sierra Nevada, à ses frais, alors que d'autres équipes y organisent des stages. Bien lui en a pris.

Pour Thibaut Pinot, le mal était plus profond. Déja fort sur les plus hauts sommets du Tour dès 2012, il lui fallait régler ce problème de descente, blocage psychologique qui lui a valu un moment d'être la risée des réseaux sociaux. Le Franc-comtois a appris cet hiver à ppréhender la vitesse en participant au Trophée Andros, et faire d'elle un allié plutôt qu'un ennemi. Mission accomplie puisque plus d'une fois c'est lui-même qui a assuré la descente en tête de file sur ce Tour.

 

Péraud fait de la résistance

La confirmation des jeunes français aux yeux du grand public en éclipserait presque la performance de "Jicé" Péraud. Le vétéran d'Ag2r la Mondiale est le dauphin de Vincenzo Nibali (Astana) sur ce Tour, et il a été le seul capable de tenir en respect le Squale en 3e semaine dans les Pyrénées. Sa saison ne se résume pas au Tour car Péraud a brillé auprès des plus grands depuis février s'imposant au Critérium International, au Tour Méd et en réalisant un top 3 et un top 5 au Pays Basque et à Tirreno Adriatico, épreuves World Tour. Ag2r la Mondiale a eu le nez creux en récupérant le Français après sa pige chez Omega Pharma-Lotto, et n'a d'ailleurs pas hésité à le prolonger quelques jours avant le Tour de France. 

 

Attention à l'excès de confiance

Plus difficile que la révélation aux yeux du grand public, la confirmation des attentes placées en eux sera dans les années à venir l'un des principaux sujet de discussion. "Peuvent-ils gagner le Tour ?" est une question qui brûle les lèvres de chacun des amateurs de la petite reine. L'omniprésence française sur ce Tour laisse présager de très belles heures au vélo dans l'hexagone. Mais l'avenir est-il aussi radieux que les médias laissent le penser ? 

Retour en 2013, retour sur les routes de la Vuelta. Chris Horner est sacré et Nibali est son dauphin de 37 secondes. Pinot, lui aussi présent sur les routes ibériques est pointé à plus de 8 minutes du Squale. Sur les champs ce dimanche, c'est avec un retard équivalent qu'il est monté sur le podium. Dramatique ? Certainement pas. Irréversible ? Non plus. Ces 8 minutes ne sont pas le fruit d'un Tour classique. Il faudra quelques années avant que les coureurs affrontent à nouveau les pavés en juillet. Et les cassures/bordures ne risquent plus de piéger Pinot avant un long moment. 

Ce Tour fût particulier dans son scénario, installant sur un piédestal un coureur qui a été oublié par sa concurrence tant il était fort. C'est avec une marge de manoeuvre immense que Nibali s'est imposé à Hautacam par exemple. Ces 8 minutes ne sont pas révélatrices du réel écart de niveau, et doivent forcer le clan français à garder la tête froide pour un jour, obtenir le Saint Graal.

 

Une poussée de croissance à l'internationale

Cet essor français (qui se fait aussi grâce à Barguil, Démare, Bouhanni etc) est une réelle vengeance sur les années de disette passées. Mais cette présence ne doit pas occulter l'émergence de coureurs tout aussi bons aux 4 coins du monde. Nairo Quintana, Fabio Aru, Wilco Keldermann sont autant de coureurs qui vont briller dans les années futures, et finiront par succéder aux Froome, Contador et Nibali. La tâche ne s'annonce pas facile en présence de ces coureurs, même si "les bleus" n'ont en aucun cas à rougir de leur niveau. 

 

Chasser d'autres lièvres ?

La presse française a tendance à ne jurer que par le Tour de France. L'an prochain, ce sera le trentième anniversaire de la victoire de Bernard Hinault, et il est donc logique de placer des attentes envers Pinot et Bardet dans ce domaine. Doivent-ils pour autant ne jurer que par la Grande Boucle ? Certainement pas. L'un comme l'autre ont le potentiel pour briller sous d'autres cieux. Pinot avait déjà émis le souhait de prendre le départ du Giro 2015, et Bardet a montré le bout de son nez plus d'une fois sur les courses World Tour d'une semaine, en terminant 4e au Tour de Catalogne et 5e du Dauphiné.